Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Courir les rues. Battre la campagne. Fendre les flots

13 novembre 2009

. Allez hop, on déménage, on rééssaye, encore et

.

Allez hop, on déménage, on rééssaye, encore et encore....

http://colline2.canalblog.com/




.

Publicité
Publicité
12 novembre 2009

..

.



DSC_0295A




.

9 novembre 2009

MP231

9 novembre 2009

Souvenir concernant les arbres : les arbres

Souvenir concernant les arbres : les arbres étaient complices. Souvenir concernant les maisons : les maisons ont été complices. Souvenir concernant les grandes figures tutélaires de l’enfance : elles étaient complices. Souvenir concernant les automobiles : elles vous emmenaient. Souvenir concernant les voyages : au loin, ou pas si loin, souvenir des voyages. Souvenir concernant les rivières, les ciels. Souvenir concernant la mer, et marcher au long de la mer. Souvenir concernant les voix : elles venaient jusque dans les rêves. Souvenir concernant les rêves : qu’à nouveau on s’y love. Souvenir concernant les objets : minuscules, parfois, pour saisir ce hors vous-mêmes que vous leur abandonniez. Souvenir concernant votre peau, et écorchures, et la maladie même, parfois favorable, et le repos – qu’on pense seulement aux temps de repos, pour que reviennent les souvenirs : on passe par les odeurs, cette pièce en été, cette maison prêtée, cette ombre au bout du champ, ce creux dans la dune. Souvenir des villes où on se perd, et souvenir des lumières des villes. Souvenir d’un spectacle, et impossible souvenir de tous les spectacles : et de quel spectacle le plus humble on aura l’image la plus persistante. Souvenir des fleuves, ils étaient si calmes, souvent. Souvenir des routes : on était longtemps au bord, parfois, attendant qui vous prenne. Souvenir d’autres mondes : les mondes intérieurs où on rampe, les précipices qu’on surplombe, les couloirs où on entre, les pièces où de si étranges masques attendent. Et souvenir d’autres mondes : les langues étrangères, la violence ou l’insulte qu’on vous fait, le coup qu’on prend. Souvenir des souvenirs : on était si bien, parfois, ensemble à se souvenir – et ceux qui ont aujourd’hui l’âge que vous aviez, y passent aussi leurs après-midis et leurs nuits. Souvenir des visages. Souvenir de rien d’autre que la présence, quand elle est favorable. Et souvenir des nuits de travers, des nuits de fissure, des éclipses du monde. Souvenir de soi-même sans savoir à quoi on ressemble, petit corps marchant, corps agrandi et maladroit marchant, corps oscillant ou tombant, corps incapable de penser parfois ou réfléchir et les yeux écarquillés pourtant tenir. Souvenir, se souvenir.

F. Bon

7 novembre 2009

MP898

Publicité
Publicité
4 novembre 2009

MP14

1 novembre 2009

MP65

30 octobre 2009

MP402

28 octobre 2009

MP98

27 octobre 2009

MP229

25 octobre 2009

mp890

23 octobre 2009

FOND_VIDEO

FOND_VIDEO

23 octobre 2009

MP71

22 octobre 2009

mp853

21 octobre 2009

mp889

20 octobre 2009

mp888

19 octobre 2009

MP32

18 octobre 2009

mp887

13 octobre 2009

MP616

12 octobre 2009

Elle ne vous fait plus peur. Elle est toujours

Elle ne vous fait plus peur. Elle est toujours dangereuse, imprévisible dans son calme. Mais la peur s’en est allée, la peur ne fait plus partie de sa substance profonde, impénétrable. La peur s’est défaite en une seconde. Évaporée, dissoute, partie comme peut venir la lassitude dans un amour : en un instant. En un instant pour toute la suite des temps. Jusqu’à ce jour, entre elle et vous, il y avait la peur. Elle était là comme une loi non écrite, souveraine dans le silence. Toutes les peurs viennent de l’enfance, pour la châtier, pour l’empêcher d’aller son cours. Tous les enfants connaissent la peur d’une connaissance intime, personnelle — mais pendant longtemps elle ne les atteint pas dans leur enfance. Ils la contournent, ils la frôlent et même ils jouent avec. Tu as peur des insectes et des uniformes, des mauvaises notes et des chiens, tu as peur des revenants. La peur est comme une avancée de l’âge adulte dans ton enfance. Elle a sa place, elle a ses heures, elle a ses lieux. Mais elle ne t’arrête pas. Tu tombes, puis tu te relèves, tu pleures et la seconde après tu éclates de rire. La joie est encore plus forte. Le goût de vivre pour vivre. La peur c’est la nuit, la joie c’est le jour. L’enfant compose avec la peur comme il compose avec la nuit, avec les ombres, avec l’insuffisance des parents, comme il compose avec tout. La peur est une donnée matérielle du monde, parmi des dizaines d’autres. Il faut savoir que la nuit noire accélère les battements du cœur rouge. Être seul dans un chagrin ou dans le vert d’une forêt, c’est effrayant. Il faut le savoir mais cela ne concerne pas l’esprit, le dedans, cela donne une information sur le monde — comme de savoir que le vent du nord est glacé, que la neige reste toujours en altitude sur les sommets. Alors tu l’apprends et puis tu l’oublies, comme dans l’enfance on oublie aussitôt ce qu’on sait pour aller jouer un peu plus loin, pour continuer de perdre son temps, de jouir du grand bonheur de perdre son temps. C’est une chose que les parents ont du mal à comprendre, cette jouissance-là. Ne reste pas désœuvré, fais quelque chose, prend un livre. Même le jeu ils voudraient que ce soit éducatif — pas que pour jouer, pas que pour rien. C’est que les parents sont des adultes et que les adultes sont des gens qui ont peur, qui se soumettent à leur peur, qui la connaissent d’une connaissance servile, sombre. La peur n’est plus comme hier dans le monde, à certains endroits du monde, dans les dorures d’une légende ou dans les recoins d’une rue. Elle est maintenant dans l’esprit des adultes. Dans le sang de leur sang, dans le cœur de leur cœur. Elle les mène de part en part, elle est enfin venue à bout de l’enfance infatigable. Elle fait les mariages tristes — par peur de la solitude. Elle fait les travaux de force — par peur de la pauvreté. Elle fait les vies absentes — par peur de la mort. Quand elle descend sur l’enfance, la peur s’évapore aussitôt. Quand elle descend sur les adultes, elle reste, elle s’entasse. On dirait de la neige, une neige qui ne tomberait pas sur le monde mais sur l’esprit. La peur qui entre dans un cœur adulte rejoint la peur qui y était déjà. Elle s’effondre en elle-même, elle s’ajoute à elle-même comme de la neige grise. Alors tu ne bouges plus. Alors tu t’interdis de bouger sous la neige sale, tu ne sors plus de chez toi, de ton mariage, de ton travail, de tes soucis. En resserrant ta vie tu cherches à diminuer le champ de la peur, à ralentir l’avalanche grise. Tu es comme ces animaux soudain pétrifiés par le bruit du vent dans les branches, incapables d’aucun mouvement, empêchés d’aller plus loin qu’eux-mêmes. Comment sortir d’une telle misère. Comment sortir de ce dans quoi on ne se souvient pas être entré. L’enfance n’a ni début ni fin. L’enfance est le milieu de tout. Comment rejoindre le milieu de tout. Cela se fait sans votre volonté. Cela se fait sans vous — par la grâce d’un amour plus rapide que vous-même, plus rapide que votre peur ou que le bruit du vent dans les branches. Oui, c’est comme ça que vous êtes enfin venu à elle, après longtemps d’attente, longtemps de peur. D’un seul coup. D’un jour au jour suivant. Et maintenant vous ne savez plus vous passer d’elle. On vous dit : tu sais, tu ne devrais pas aller si loin, elle peut tuer quand même. Mais vous ne le croyez plus, ou plutôt vous répondez : qu’elle fasse ce qu’elle veut de moi. Ses jouissances sont trop grandes pour que je les quitte. Comment ai-je pu passer autant d’étés sans elle. Tant d’heures blanches et bleues, loin d’elle. Bien sûr il y avait les livres. La lecture est ce qui lui ressemble le plus. D’ailleurs vous vous approchez d’elle avec une poignée de livres — que vous n’ouvrirez pas. Elle est si adorable, tellement plus adorable que les plus beaux des livres. Cet été-là, vous allez la voir tous les jours, vers la fin de l’après-midi. Vous dites, bon, je vais me baigner. Mais il serait plus juste de dire : excusez-moi, j’ai rendez-vous, j’ai rendez-vous avec l’eau, avant je la craignais, à présent je ne désire plus qu’elle, elle est comme une femme, vous comprenez, et même un peu mieux qu’une femme, oui nettement mieux. Plusieurs chemins mènent à votre amour. Vous pouvez suivre un canal rempli d’ombre ou traverser une campagne creusée de lumière. D’où que vous arriviez, c’est le bonheur : l’immensité de l’étang, là, à deux pas. Long, mince, entouré d’arbres. Une eau même pas jolie, parfois terreuse. Vous y entrez sans précaution, vous filez droit au cœur, droit au milieu de l’étang, à égale distance des deux rives. Le visage à peine tendu vers le ciel, le corps glissant sous l’eau comme sous une soie légère. La peur n’est plus là. Elle est partie avec la pensée. La pensée n’est plus dans votre esprit. Elle n’est plus dedans mais dehors : vous allez dans l’eau comme dans une pensée qui se penserait toute seule, d’elle-même, sans vous. Vous nagez longtemps dans la pensée extérieure, dans l’eau du monde. Longtemps l’esprit vide, le corps sans pesanteur. Quand vous sortez de l’eau, ce n’est pas pour la quitter mais pour la contempler encore mieux, de plus loin, de ce regard apaisé qui succède à l’amour. Regarder comment elle prend la lumière, comment elle change avec le mouvement imperceptible des heures, comment elle réagit aux plus secrètes humeurs du ciel. Cet étang, vous le connaissiez dans l’enfance. Puis vous l’aviez oublié. Depuis vous aviez, avec l’été, un problème : vous ne saviez pas quoi en faire. Vous étiez devant l’été, devant les vacances, comme devant le mariage, comme devant le travail : sachant comme cela fonctionne, ignorant à quoi ça sert. Maintenant vous savez : l’été, ça ne sert à rien — comme l’amour, comme la joie. Vous ne trouvez plus le temps de lire, d’écrire, de répondre aux invitations. Vous ne pensez plus qu’à l’eau. Quand elle est là vous vous y perdez. Quand elle n’est plus là vous attendez l’instant de la revoir. Ce serait comme une histoire d’amour, sauf qu’il n’y aurait pas d’histoire. Mais l’amour est bien là. Il n’a pas de forme, il n’a pas de visage, il n’a pas de nom. Mais il est bien là. Il est venu comme arrive tout amour, après la fin des temps — fin de la mort, fin de la peur.

C Bobin

Publicité
Publicité
1 2 3 > >>
Publicité